Au prochain voyage à Réo je ne prendrai en photo que les détails de la vie quotidienne.
20 févr. 2020Au prochain voyage à Réo je ne prendrai en photo que les détails de la vie quotidienne.
Tout ce que nous semblons ignorer en fait. A quoi servent les photos des bons moments ? A fixer l'éphémère et faire croire que final que tout va bien. Comme dans un catalogue. La vie n’est pas un catalogue.
On ne prend pas de photo du malheur, ni de l’insignifiant, ni du rien : on zappe la vie des gens, une vie qui s’ignore .Mais je en veux pas me transformer en voyeur. En touriste de base.
Je voudrai voir le moindre caillou et l’entendre parler à travers la photo.
Je voudrai photographier le vent qui arrache tout.
Je voudrai fixer sur la pellicule les rayons du soleil.
Un morceau de pain rassis posé sur une table. Un os abandonné au bord du chemin. Le plat vide sur la table posé au milieu de miettes et de pelures de fruit.
Photographier le blé qui vient juste d’être coupée pour figer l’odeur acre qu’il dégage.
Photographier l’eau qui s’écoule enfin dans les jardins pour en écouter le bruissement, saisir le moment clé ou elle disparaît dans la terre sèche.
Rendre éternel le meuglement des vaches rachitiques. Voir le cri de la Vie envahir l’espace a travers le temps qui passe et qui efface tout ce qui n’est jamais vu.
Faire une série de photos lorsque nous sommes épuisés, quand on pleure face à l'échec . Des photos de l'angoisse, de la fatigue, saisir l’inquiétude dans les regards, la peur, la chaleur.
Je voudrai fixer la vraie vie. Pas la vie rêvée.
Parce que ces gens ils vivent. et ils méritent le mieux qui arrive.